La Cour de cassation condamne fermement une jurisprudence constante de la Cour d’appel de Rennes en matière de mariage sans autorisation du curateur

Il arrive que des personnes mariées sous le régime de la curatelle en France se marient à l’étranger sans avoir préalablement, du moins formellement, obtenu l’autorisation de leur curateur, contrairement à ce qu’exige l’article 460 du Code civil.

La Cour d’appel de Rennes avait infirmé des jugements du Tribunal de Grande Instance de Nantes ayant accepté la mainlevée d’opposition à transcription de mariage au motif que le curateur avait donné autorisation postérieurement au mariage en jugeant que :

« il découle nécessairement de la règle édictée à l’article 180 du Code civil, que ce texte protège non seulement l’intérêt
particulier des cocontractants, mais aussi instaure un ordre public de protection confié au ministère public, qui est habilité
spécialement par ce texte au sens des articles 422 et 423 du code de procédure civile, à contester la validité d’un mariage
contracté sans le consentement libre de l’un des époux ;

« le mariage d’une personne sous curatelle sans le consentement préalable de son curateur ou du juge des tutelles (article 460
du Code civil) correspond à un mariage sans consentement, contracté en contravention aux dispositions de l’article 146 du Code
civil qui énonce qu’il n’y a pas de mariage lorsqu’il n’y a point de consentement, qui fonde une nullité absolue et qui peut
être attaqué par le ministère public conformément aux dispositions des articles 184 et 190 du Code civil ;

« le régime de nullité absolue du mariage pour absence de consentement, tel que prévu à l’article 146 du Code civil, diffère
du régime des autorisations préalables fixé à l’article 460 du même code ;

« le ministère public soutient à juste titre que l’autorisation a posteriori effectuée par le nouveau curateur n’a aucune
conséquence légale et ne peut régulariser l’irrégularité de la validité du consentement, que l’autorisation doit être antérieure
à la célébration du mariage afin que le curateur puisse s’assurer du consentement libre et éclairé du majeur protégé ;

« en conséquence, le mariage litigieux est dépourvu de validité, faute de consentement valablement exprimé par l’époux, majeur protégé, par application des dispositions des articles 146, 180 et 460 alinéa 1er du Code civil en l’absence d’autorisation
préalable de son curateur » (Cour d’appel, Rennes, 6e chambre A, 12 septembre 2016)

Dans un arrêt en date du 20 avril 2017, la première chambre de la Cour de cassation condamne très clairement la position de la Cour d’appel de Rennes, qui n’hésitait pourtant pas à affirmer que :

« l’absence d’autorisation s’analyse de jurisprudence constante, comme un défaut de consentement pour le majeur protégé »

La Cour de cassation juge pour sa part que :

« L’absence d’autorisation préalable du curateur au mariage du majeur en curatelle ne correspond pas à un défaut de consentement, au sens de l’article 146 du code civil, mais à un défaut d’autorisation, au sens de l’article 182 du même code, sanctionné par la nullité relative et de nature à être couvert par l’approbation du curateur ».

Le pourvoi critiquait donc à juste titre l’automaticité de la nullité du mariage du fait de l’absence d’une autorisation préalable du curateur, mais a été rejeté parce que la Cour d’appel de Rennes avait par ailleurs jugé dans son arrêt qu’il était établi par les pièces du dossier que la personne concernée souffrait au moment du mariage d’une altération de ses facultés mentales qui lui interdisait de comprendre la portée de son engagement et d’exprimer un consentement valable, ce qui est pour le coup une véritable cause de nullité au regard de l’article 146.

Il résulte de cet arrêt très important pour la matière que l’absence d’autorisation du curateur n’est pas une cause absolue de nullité du mariage comme peut par exemple l’être la bigamie.

Les personnes concernées, si elles ont le soutien de leur curateur ou ne sont plus sous curatelle, peuvent donc agir pour demander la mainlevée d’une opposition à transcription de leur mariage dont elles auraient fait l’objet.